
Les processus standardisés de récupération de l’impôt à la source passent souvent à côté d’événements inhabituels, tels que les scissions. Le cas de Vivendi montre pourquoi les gestionnaires de fonds doivent examiner activement toutes les formes de retenues à la source transfrontalières.
Les opérations d’entreprise ont souvent des implications fiscales qui ne sont pas immédiatement apparentes. La scission de Vivendi en décembre 2024 en est une illustration. Bien que la transaction semble simple à première vue, les implications fiscales sont beaucoup plus nuancées et méritent l’attention des investisseurs internationaux.
Dans le cadre de cette opération, les actionnaires ont reçu des actions nouvellement émises dans trois sociétés (Canal+, Havas SA et Louis Hachette Group) pour chaque action Vivendi détenue. Bien qu’une partie de la valeur ait été classée comme un remboursement de capital, 4,27 euros sur les quelque 6,49 euros par action ont été classés comme un « dividende en nature » en vertu de la législation fiscale française. Cette partie était taxée à 25 % pour les investisseurs étrangers. Résultat : plus d’un euro par action a été retenu sur plus de 3,27 milliards d’actions émises.
Ce niveau de perte fiscale peut affecter de manière significative la performance d’un portefeuille, en particulier si l’exposition à Vivendi y est importante. Néanmoins, il se peut que cette retenue n’ait pas été reconnue ou qu’elle n’ait pas fait l’objet d’un suivi dans le cadre des procédures habituelles.
Pourquoi cet aspect est négligé
Les distributions imposables sous forme d’actions, comme dans le cas de la scission de Vivendi, échappent souvent aux processus normalisés de récupération de la retenue à la source. Ces processus sont généralement conçus pour identifier et récupérer l’impôt sur les dividendes en espèces ou les paiements de coupons. Lorsque les revenus sont distribués « en nature », en particulier dans le cadre d’activités commerciales, une approche différente est nécessaire – et ces revenus ne sont souvent pas automatiquement signalés en vue d’une récupération.
Mon expérience personnelle montre qu’à moins que les équipes ne surveillent activement ces événements moins courants, la retenue à la source associée passe inaperçue et n’est pas récupérée. Il en va de même pour d’autres options de récupération sortant de la norme, notamment si elles impliquent des juridictions ayant des procédures administratives différentes ou des régimes d’exonération spécifiques nécessitant un traitement spécialisé. Ces situations échappent souvent à la procédure normale, bien qu’elles offrent un potentiel de récupération important.
Récupérable, mais dans un cadre temporel restreint
La bonne nouvelle est que dans de nombreux cas, la distribution de Vivendi peut être récupérée – par le biais de taux conventionnels réduits ou, en fonction de la structure et du pays de l’investisseur, par le biais d’une exonération totale. Mais le temps pour agir est limité. En droit français, un délai de prescription de deux ans s’applique à compter de la fin de l’année civile au cours de laquelle les revenus ont été perçus. Pour cet événement, les demandes doivent être soumises avant le 31 décembre 2026.
Compte tenu de l’impact par action et de l’ampleur de l’événement, il est conseillé aux gestionnaires de fonds d’agir dès maintenant pour ne pas manquer cette échéance.
Au-delà du processus standard
On serait tentés de penser que la retenue à la source est entièrement prise en compte – jusqu’à ce qu’un examen plus approfondi révèle des lacunes. D’après mon expérience, même les gestionnaires de fonds expérimentés peuvent être surpris par des récupérations manquées dans le cadre d’événements de niche ou de juridictions aux règles uniques.
C’est précisément dans ces cas de figure qu’une approche proactive se révèle utile. En posant les bonnes questions et en élargissant le suivi, les investisseurs peuvent découvrir des opportunités de récupération cachées. Parfois, ce n’est pas en faisant plus que l’on obtient les meilleurs résultats, mais en voyant ce que les autres négligent.
Comme l’illustre le cas de Vivendi, l’inattention peut coûter cher. Les échéances approchant et les fenêtres de récupération se refermant rapidement, le moment est venu de réexaminer ce que votre processus actuel a peut-être oublié de prendre en compte.
Reuben John est Managing Director DACH, UK & IE chez Wtax, qui fait partie du panel d’experts d’Investment Officer.